A l’occasion de la date de Roméo Elvis à la Rockhal (Luxembourg) le 6 novembre prochain, nous avons eu la chance de discuter avec lui de la sortie de son nouveau clip “Chocolat“, titre éponyme de l’album bientôt disque de platine sorti en avril 2019, de politique, de sa collaboration avec Damon Albarn et Quentin Dupieux et de cette année remplie de concerts et de bonnes nouvelles.

Interview : Maude JNVX
Retranscription : Sébastien Muzi

“J’aime me donner à fond et que mes concerts soient les plus intenses possible. “

iHH™ Magazine : Salut Roméo, merci de nous accorder un peu de temps ! 

Roméo Elvis : Salut, aucun soucis ! 

iHH™ Magazine : On va revenir un peu sur ces derniers mois qui ont été bien agités pour toi. “Chocolat” est sorti en avril 2019, depuis tu es sur les routes, une grosse tournée qui a englobé les festivals de l’été et qui passe par la Rockhal au Luxembourg le 6 novembre. Tout ça se terminera à Paris en mars 2020 à l’AccorHotels Arena. Il y a eu une petite pause avant les Zéniths mi-septembre, est-ce que tu n’es pas trop fatigué par cet enchaînement ? 

Roméo Elvis : Un peu, mais c’est normal. Comme les gens peuvent être fatigués après avoir été au bureau toute la semaine pendant X mois d’affilée ! 

iHH™ Magazine : C’est sûr, mais c’est très dense, tu es presque en permanence sur la route. 

Roméo Elvis : A fond, mais après c’est quelque chose que je recherche, d’être sur scène et avoir cette énergie. C’est épuisant mais j’y vais de bon cœur. Il y a d’autres artistes qui vont plus se contenter de se balader sur scène et de ne pas trop se donner, ils ne recherchent pas plus. Disons que c’est épuisant mais j’en ai besoin. De l’énergie et du sport ! Je récupère après, et avec plaisir. 

Roméo Elvis au Cabaret Vert, © Maude JNVX

iHH™ Magazine: Je t’ai vu sur scène pour la première fois au Luxembourg en 2017 pour le Sonic Visions, il faisait deux degrés, c’était au milieu des hauts fourneaux, et t’avais réussi à réchauffer tout le monde. Cet été, j’étais aussi présente au Cabaret Vert et j’ai pu constater que ton expérience de la scène avait complètement évolué. Parfois, les concerts de rap peuvent être un peu linéaires, toi tu proposes un show qui est finalement très rock. 

Roméo Elvis : Oui ! 

iHH™ Magazine: Tu es accompagné de musiciens sur scène, Orelsan était aussi présent au Cabaret Vert avec un groupe live, ce type de prestation sort un peu du lot. 

Roméo Elvis : Cela enrichit la proposition, et ce pour n’importe quel concert. Une fois que le concert est proposé avec des musiciens, c’est plus organique. On peut dire que c’est plus rock dans le sens où le son des instruments est inimitable. Que ce soit avec une guitare, de la batterie ou une basse, c’est une proposition scénique qui rappelle forcément les aspects rock. Après, on y met tout ce qu’on aime et qui nous vient du rap. 

iHH™ Magazine: Tu te donnes sur scène, et ça se voit. 

Roméo Elvis : En tout cas, j’adore ça ! J’aime me donner à fond et que mes concerts soient les plus intenses possible. C’est pour ça que je pense qu’on va se souvenir de moi, à terme. 

Roméo Elvis au Cabaret Vert, © Maude JNVX

“Le Straussfest c’était comme […] un magasin de jouets et je pouvais avoir tous les jouets que je voulais. “

iHH™ Magazine : En plus de ça, on a pu te suivre toi et ton équipe cet été sur Youtube, avec le Chocolat Show. C’était une super idée d’ouvrir l’expérience de la tournée des festivals à tes fans. En parlant de ça, tu as pu prendre les manettes à Dour et créer ton propre festival au sein du festival ?

Roméo Elvis : Ah c’était trop cool ça ! 

iHH™ Magazine: C’était le Straussfest

Roméo Elvis : Exactement, le Straussfest à Dour. On a été invité par l’organisation du festival. C’était vraiment cool, j’ai pu inviter toutes sortes d’artistes. Des mecs que j’écoutais à l’ancienne avant de faire du rap, dans la drum n’ bass, mais aussi des artistes qui cartonnent en ce moment parce que j’avais l’opportunité de me faire des kiffes. C’était un peu comme si j’avais un budget illimité ! Comme si j’étais dans un magasin de jouets et que je pouvais avoir tous les jouets que je voulais. J’ai pris le jouet à la mode, le truc tendance, avec un gros rappeur américain. 

iHH™ Magazine: Oui, t’as invité Sheck Wes

Roméo Elvis : Ouais ! Et après pour le reste, j’ai donné l’opportunité à des rappeurs que j’aime bien de faire des shows dans le meilleur festival de Belgique, et un des meilleurs d’Europe, à mes yeux en tout cas. C’était cool de pouvoir faire tout ça en un coup ! 

iHH™ Magazine : Ca t’a donné envie de reconduire ça ? Peut-être même dans un autre cadre que Dour

Roméo Elvis : Oui ! Bien sûr.

iHH™ Magazine : Créer ton propre plateau. 

Roméo Elvis : Ouais totalement. Travailler en collaboration avec de grandes instances. Le délire de devenir indépendant à tout prix, de créer son propre truc et tout, je l’apprécie, mais je suis plus partant pour créer quelque chose de fort avec de grosses entreprises par exemple. L’idée c’est pas juste de s’émanciper, de faire son truc, on n’est pas dans la jungle pour moi. Je suis sûr qu’il y a moyen d’avoir de l’influence tout en faisant suivre des gens qui ont de gros moyens. 

Roméo Elvis au Cabaret Vert, © Maude JNVX

“Il y a encore d’autres gars méritants chez Back In The Dayz, et on est tous liés. “

iHH™ Magazine: D’ailleurs en parlant d’entourage, pour le Cabaret Vert, il y avait une scène spéciale Back In The Dayz, j’avais eu l’occasion de discuter avec Max Méli (co-fondateur de Back In The Dayz n.d.l.r.), qui m’avait expliqué un peu comment la sélection s’était faite avec Zola, Krisy, Todiefor et Di-Meh. J’ai l’impression qu’il y a quelque chose de très fort chez Back In The Dayz, dont tu fais aussi partie, quelque chose de familial, entre amis. Un truc où chacun se tire vers le haut. 

Roméo Elvis : Ouais totalement ! Après c’est parce qu’on se connait tous très bien. On a tous été logé à la même enseigne, on a tous vécu les mêmes histoires, tous voyagé ensemble. Max et Anthony, les deux managers principaux, c’est des amis depuis toujours. On se motive tous les uns les autres et on espère tous que ça va péter ! 

iHH™ Magazine: C’est en bonne voie ! Cela a même déjà explosé pour pas mal d’entre vous, en tout cas pour toi. 

Roméo Elvis : (rires) Clairement ! Moi j’ai plus qu’à faire fonctionner la machine, la faire avancer. Pour les autres, y’a encore d’autres gars méritants chez Back In The Dayz, et on est tous liés. 

iHH™ Magazine : D’ailleurs pour toi, il y a plein d’actu toutes fraîches. Le clip de Chocolat vient de sortir ! 

Roméo Elvis : Oui ! 

iHH™ Magazine: Tu peux nous en dire un peu plus ? J’ai vu que tu travaillais avec des réalisateurs différents pour chacun de tes clips. 

Roméo Elvis : On a fait pas mal de clips au fil des années, du coup on a pu rencontrer des gars très talentueux. Là, pour le coup c’est Tony Truand, un mec avec qui j’avais déjà fait le clip de ‘Malade‘. Pour faire court, le clip de « Chocolat » revisite « Charlie et la Chocolaterie ». 

“Jouer dans un film, c’était un peu un fantasme inattendu. “

iHH™ Magazine: T’as également annoncé sur Instagram une collaboration avec Lacoste. Est-ce que c’est un moment de gloire pour le petit croco en toi ? 

Roméo Elvis : C’est l’aboutissement d’un grand objectif ! Même si, au final, ça n’a rien à voir avec la musique, c’était pas vital,  on y est arrivés et ça faisait longtemps que j’espérais voir cette collaboration se mettre en place. Là, je suis égérie sur leur campagne Printemps 2020. On va travailler ensemble pour la suite, voilà… On va faire de belles choses ensemble. 

iHH™ Magazine: C’est top ! Toi de base, t’aimes bien les sapes, tu as déjà ta ligne de vêtements à côté avec Strauss et d’autres produits. Ça semblait quand même évident que Lacoste finisse par voir tes appels !

Roméo Elvis : (rires) Ouais c’est clair ! 

iHH™ Magazine: Tu vas collaborer au design de certaines pièces ? 

Roméo Elvis: Là pour l’instant, je vais juste porter leur collection. Après, on va essayer de travailler un truc justement pour créer une belle histoire d’amour ensemble. 

iHH™ Magazine: D’accord, on a hâte de voir ça. 

Roméo Elvis : Moi aussi. 

Roméo Elvis au Cabaret Vert, © Maude JNVX

iHH™ Magazine: Egalement, parmi toutes ces bonnes nouvelles, tu viens de tourner dans un film pour Quentin Dupieux, aux côtés d’Adèle Exarchopoulos et du Palmashow. C’était un rêve de gosse pour toi de faire du cinéma ? 

Roméo Elvis : Bien sûr, mais je pense que c’est comme monter dans une fusée ou devenir footballeur professionnel ! Ça fait forcément partie des rêves qu’on a quand on est gosses, on se dit que c’est la classe. Là, c’était un peu comme un fantasme inattendu. Je pouvais y croire un peu secrètement mais j’avais jamais vraiment rien mis en œuvre pour. Nous on faisait notre musique, nos clips, mais j’ai rien passé comme casting ou j’ai pas demandé directement à des réalisateurs. J’espérais pas plus que ça quoi… Quand c’est tombé, je me suis dit: “Putain c’est génial !“. En plus, Quentin Dupieux, c’est quand même un mec dont j’aime énormément le travail. 

iHH™ Magazine: Vu ton humour et ton univers, y’a quelque chose d’assez logique là-dedans. 

Roméo Elvis : A fond ! On se comprend très bien. C’était génial, vraiment génial, j’étais comme un gosse, c’était ma première fois. C’était super cool aussi de vivre une première fois dans un truc après 6 ans de carrière rap, à évoluer, en train de péter. Etre dans autre chose, ça fait du bien, c’était vraiment cool, j’espère que ça arrivera encore. 

iHH™ Magazine: J’allais te demander justement. Vues les photos que tu as pu poster sur le tournage, on voit qu’il y a un bon feeling. Il y a d’autres choses qui peuvent venir par la suite ? 

Roméo Elvis : Ben y’a déjà deux autres propositions en fait… 

iHH™ Magazine: Ah oui ? 

Roméo Elvis : Pour faire un Marvel… 

iHH™ Magazine: … Sérieusement ? 

Roméo Elvis : Non ! (rires) 

iHH™ Magazine: Dommage ! Un autre Quentin Dupieux peut-être alors. Il a l’air prolifique en ce moment, il vient de sortir “Le Daim“, il y a quelques mois, et il enchaîne direct. 

Roméo Elvis : Ah ouais mais lui, c’est assez incroyable. D’ailleurs, je crois qu’il est déjà sur un autre film en plus de “Mandibules“, qui est donc celui dans lequel je joue. Il me semble qu’il est en train de terminer de tourner aujourd’hui, là en ce moment même, à l’heure qu’il est, ils sont en train de faire les dernières prises de “Mandibules“. Et il est déjà sur un autre film ! 

iHH™ Magazine: Ce mec ne s’arrête jamais ! 

Roméo Elvis : Incroyable… Je n’ai jamais vu ça personnellement. 

iHH™ Magazine : Il y a des gens comme ça ! 

Roméo Elvis : C’est clair. 

Roméo Elvis au Cabaret Vert, © Maude JNVX

“Envers et contre tout, il y aura toujours le rap.”

iHH™ Magazine : Autre chose, pour revenir à ton album, il y a un très bon duo avec Zwangere Guy qui s’appelle “Kuneditdoen“, on avait demandé à Max Méli des infos concernant la scène rap flamande et des artistes à suivre, parce que c’est méconnu en France et c’est dommage. Est-ce que tu aurais également des artistes à nous conseiller ? 

Roméo Elvis : Bien sûr, il y a par exemple ‘Stikstof‘ qui est justement le groupe de Zwangere Guy, ou encore Dutch Norris, c’est comme Chuck Norris, mais avec Dutch à la place… 

iHH™ Magazine : C’est noté ! Pour le reste des featurings de “Chocolat“, il y avait de sacrées belles surprises, avec -M- et Damon Albarn

Roméo Elvis : Yes ! 

iHH™ Magazine : J’ai lu que ta collaboration avec Damon Albarn avait été très rapide en studio. 

Roméo Elvis : Très efficace on peut dire. Très brut. C’est vrai que ça n’a pas duré une journée entière. On a un peu sauté toutes les étapes de formalité, type prendre un verre, discuter, savoir comment va l’autre, découvrir l’univers de chacun. En fait, on s’est vite compris. Lui il m’a dit: “Je suis chaud”, donc j’ai compris qu’il était chaud, j’ai pas eu besoin de le baragouiner en lui faisant écouter tout l’album, en lui montrant ce que je savais faire. Lui il est venu pour enregistrer un morceau et voilà. Il voulait écouter le morceau, je lui ai fait écouter, il était ok, on a enregistré, paf paf, c’est bon t’aime bien ? Ouais, merci au revoir. En deux heures c’était plié, et au final je préfère deux heures comme ça plutôt que quatre heures avec des temps de trop, du malaise, des battements. Moi j’aime bien quand c’est efficace, vite fait bien fait. De manière générale, je suis toujours content quand ça va vite, même pour un film, quand je vais au cinéma, après une demie heure je me demande si c’est bientôt fini. J’ai rapidement envie d’en finir quoi. Ça me va comme ça. 

iHH™ Magazine : Je vais essayer de finir vite cet interview alors ! 

Roméo Elvis : (rires) non non, c’est cool ! 

iHH™ Magazine: Pour terminer avec Damon Albarn et -M-, ce sont deux pointures. Ton univers à toi a bien évolué entre “Bruxelles c’est devenu la jungle” et “Chocolat“, tu poses différemment, tu prends plus le temps et tu laisses parfois l’instru occuper davantage l’espace. Tu as su t’entourer de plein de producteurs différents pour cet album, les sonorités sont variées. A terme, est-ce que tu voudrais tendre vers une musique comme celle de -M- ou de Damon Albarn, une musique vraiment complète, très touche-à-tout ? Toi aussi tu aimerais avoir un panel très large d’univers musicaux ? 

Roméo Elvis : Oui oui, enfin, je reste quand même très fort attaché au rap. Il y aura toujours cette ADN, cette identité, au travers. Envers et contre tout, il y aura toujours le rap. C’est clair que je ne suis pas uniquement client de cette musique là, j’en écoute plein d’autres et je m’identifie à plein d’autres styles, voilà… pourquoi pas ! 

iHH™ Magazine: Avec les nombreux producteurs invités sur ton album, c’est vraiment riche. 

Roméo Elvis : Ça reflète un peu plus le style dans lequel je me retrouve à l’heure actuelle. 

Roméo Elvis au Cabaret Vert, © Maude JNVX

“On est tellement liés à MC Solaar, il occupe une place non négligeable dans le paysage rap français.”

iHH™ Magazine: En parlant de grands artistes, j’ai lu une interview de toi qui remonte à 2017, avec Clique, dans laquelle tu confiais que MC Solaar était un ami de la famille et qu’il avait promis de venir te voir sur scène. Je voulais savoir s’il t’avait fait ce plaisir depuis ? 

Roméo Elvis : Bien sûr, et c’est cool évidemment. C’est un tonton pour nous ! Ce qui est rigolo, c’est qu’on le regardait avec de grands yeux quand on était plus petits en se disant: “Waw ! On connait MC Solaar, c’est génial il est trop gentil !”, et voilà maintenant on a grandi, on a évolué, on est devenus ce qu’on est devenus et il vient nous voir en concert. Maintenant c’est lui qui nous dit: “Waw ! C’est chaud !“. La roue a tourné, c’est marrant mais c’est toujours autant un plaisir et une fierté que de le revoir. On est tellement liés à ce mec, il occupe une place non négligeable dans le paysage rap français. 

iHH™ Magazine : Je pense que, pour beaucoup, on a pu rentrer dans le rap grâce à MC Solaar. 

Roméo Elvis : Sans aucun doute. 

iHH™ Magazine : Ce n’est pas tout le monde qui peut se targuer d’avoir MC Solaar qui vient lui rendre visite pour un concert en tout cas !

Roméo Elvis : A fond. 

iHH™ Magazine : Sur ton album, on retrouve des sujets universels, l’amour, les ruptures, mais tu abordes aussi des sujets plus difficiles, notamment la mort avec un hommage à deux amis que tu as perdu. C’est: ‘En Silence‘, le duo avec Témé Tan, comment s’est faite la rencontre avec cet artiste ?   

Roméo Elvis : Ah! On se connaissait déjà avant. La rencontre s’est faite il y a un petit moment. En réalité, le morceau, je l’avais écrit totalement sur le côté, sans lui. J’avais envie d’inviter quelqu’un dessus pour que ce ne soit pas trop personnel et trop lourd de sens. Même si c’est un thème un peu sensible et triste, la perte d’un ami, puis d’un autre, le fait qu’il y ait quelqu’un d’autre, ça “ouvre” le morceau…

iHH™ Magazine : A un plus grand nombre, quelque chose de moins relié uniquement à toi…

Roméo Elvis : Oui c’est ça, ça permettait au morceau d’être plus accessible, je trouve. C’est ce que Témé Tan a permis. Je crois qu’il connaissait un des deux mecs dont je parle, je ne suis même pas sûr. Voilà, c’était une belle opportunité de travailler avec lui, et puis on a Le Motel aussi en commun. Témé Tan a pas mal bossé avec Le Motel. C’est comme ça que je l’ai rencontré en fait. 

Roméo Elvis au Cabaret Vert, © Maude JNVX

Mon avis sur la politique, si je dois en avoir un […] je préfère l’exprimer en musique.

iHH™ Magazine : D’accord ! En tout cas, le duo marche bien, sa voix adoucit le morceau. 

Roméo Elvis : Oui voilà c’est ça, artistiquement dans la forme c’est super doux. Il a une voix masculine mais hyper chaude.

iHH™ Magazine: C’est une sensibilité différente. 

Roméo Elvis : Ça fait un peu du bien quand t’écoutes le morceau ! C’est triste mais en même temps… “en silence tous les soirs…” c’est joli. 

iHH™ Magazine : Il y aussi un morceau qui m’a interpellée, parce que c’est un sujet qu’on n’aborde pas systématiquement dans le rap et c’est dommage, c’est: ‘Belgique Afrique‘ avec cette charge contre Théo Francken, ça sort des thèmes habituels. 

Roméo Elvis : En réalité c’est plus une charge contre la politique d’immigration en général et, pour revenir de manière critique sur une autre époque, contre la politique de colonisation. En fait, c’est plus un morceau pour se positionner aussi face aux aspects de la Belgique dont on doit être moins fiers. En tant qu’artiste belge qui présente toujours la Belgique sous son meilleur angle et qui est toujours là à la valoriser, pour le coup j’avais envie de faire un morceau qui montre aux gens que je pouvais aussi me poser les bonnes questions sur les responsabilités de notre pays, dans son passé et dans son actualité, en traitant de deux sujets. 

iHH™ Magazine : C’est intéressant et, d’ailleurs, c’est plutôt raccord avec les derniers événements en France puisque le discours politique est sensiblement le même. Qu’il s’agisse d’immigration ou du sentiment d’insécurité grandissant véhiculé… Au delà de ce morceau, est-ce que tu avais envie de partager un avis non seulement sur la Belgique mais plus généralement sur l’Europe, avec les politiques migratoires qui s’appliquent aujourd’hui et les discours de haine ? 

Roméo Elvis : J’ai un avis sur le monde entier, mais je pense que ça a moins d’intérêt pour un artiste comme moi si je ne fais pas l’effort de le mettre dans ma musique. Il y a certains sujets sur lesquels je me permets de m’avancer un peu, notamment sur les réseaux sociaux, pour tenter de convaincre, d’intéresser les gens. Par exemple, je parle d’écologie, avec le système des gourdes.

iHH™ Magazine : Egalement ton association avec Texpak. 

Roméo Elvis : Voilà exactement, l’association avec Texpak. On va essayer d’influencer un maximum de gens là dessus, mais je pense qu’il faut faire attention avec tout ça. Aussi passionnant et important que le sujet puisse être, je dois réussir à être bon dans ma manière de communiquer car mon public est avant tout là pour se distraire et s’amuser. Malheureusement, c’est triste, mais ils vont vite se barrer si je commence à faire de la prévention à tout-va. Mon avis sur la politique, si je dois en avoir un, c’est à ce moment là que je me rends compte que je préfère l’exprimer en musique. Je suis très médiatisé, très écouté et diffusé. Il y a certains sujets sur lesquels je préfère donc me positionner avec réflexion. 

Roméo Elvis au Cabaret Vert, © Maude JNVX

L’étiquette qu’on peut me mettre maintenant sur l’écologie, la gourde, je le prends avec humour.

iHH™ Magazine : Ce qui s’entend tout à fait car avec les réseaux sociaux et la vitesse à laquelle ça va, les gens ont vite fait de faire des amalgames, tu en as déjà fait les frais par le passé il me semble. Cela peut rapidement devenir compliqué lorsqu’on est très médiatisé et que les gens ne prennent pas de recul sur les paroles.

Roméo Elvis : Je fais mon expérience de tout ça maintenant. 

iHH™ Magazine : Sur Instagram, tu as déjà un peu alerté les gens sur l’écologie. Tu l’as fait pour Texpak et ta ligne de vêtements, c’était très clair et tu utilisais les mêmes mots que les gens qui t’écoutent. Tu es un artiste musical avant tout et tu n’as pas envie d’être érigé comme un grand défenseur d’une cause, qu’on te colle une étiquette comme les médias ont souvent tendance à faire. 

Roméo Elvis : Alors l’étiquette qu’on peut me mettre maintenant sur l’écologie, la gourde, tout ça, je le prends avec humour. Même si je pense que c’est un sujet important et qu’on peut ironiser dessus, c’est pas un problème qu’on me colle ce truc “écolo”, à ce niveau là ça ne me dérange vraiment pas. A partir du moment où c’est plus idéologique, plus social, je crois que ça devient dangereux et je peux prendre position uniquement si c’est vraiment réfléchi, si je suis sûr et fier de moi. A ce moment là, ok, je le mets en chanson et je fais une déclaration. Je pense que les artistes doivent faire attention avec ce truc là, autant qu’ils doivent prendre conscience de l’importance qu’ils obtiennent quand ils sont connus. 

iHH™ Magazine : Tu fais bien. Les médias mainstream ont tendance à associer le rap avec des prises de position, politiques, presque systématiques. Ca peut aussi ne pas être le cas parce que ça reste un divertissement avant tout. 

Roméo Elvis : Ouais ! Exactement. 

iHH™ Magazine : Tu chantes également ton amour pour ta compagne Léna Simone dans le très estival: ‘Soleil’ et j’ai remarqué que ta discrétion et ta pudeur vis à vis de cette relation sur les réseaux sociaux avaient un peu évolué, alors qu’en parallèle tu parles des dangers des réseaux sur cet album. Comment tu fais pour appréhender tout ça, quand tu décides de poster une photo de vous deux ou quand, à côté de ça, tu vas rester pudique sur d’autres choses ?

Roméo Elvis : En réalité, l’information que j’ai une copine, elle est claire depuis un moment. Au bout d’un certain temps, continuer à la cacher ça devient très compliqué. Elle est elle-même connue dans son milieu, elle est mannequin. Ca allait devenir un jeu du chat et de la souris, ça allait me stresser de plus en plus, donc j’ai préféré jouer cartes sur table, assumer cette relation sur les réseaux sociaux. On garde toujours un maximum de contrôle là-dessus. Voilà c’est sûr que maintenant, il y a des images de nous deux mais ça reste très surveillé. Ce sont des choses qui n’en livrent pas trop parce qu’au final, à l’heure actuelle, à part ma grand mère, j’ai vraiment plus quelqu’un de mon entourage direct que personne ne connait. En Belgique surtout, tout le monde connait mes parents, tout le monde connait ma sœur, et maintenant tout le monde connait ma copine. Il faut se rendre compte que tous les gens qui gravitent autour de moi, dans mon cercle ultra privé, sont des gens de notoriété publique, en Belgique au minimum. 

iHH™ Magazine : Bien sûr, même en France je pense. 

Roméo Elvis : Oui, mes parents moins en France ! Mais oui clairement… En règle générale, on sait que mes parents sont musiciens, on sait d’où ils viennent. 

iHH™ Magazine : D’ailleurs, tu remarqueras que je fais toute une interview sans jamais parler de tes parents ou de ta sœur ! (rires)

Roméo Elvis : (rires) C’est très bien comme ça, t’es la première de la journée! 

En réalité, aujourd’hui, les artistes que nous sommes, on en livre bien assez sur nous à travers les réseaux sociaux.

iHH™ Magazine : J’ai l’impression qu’aujourd’hui, pour appréhender les réseaux sociaux en étant connu, il faut en donner un petit peu, mais pas trop, juste assez pour que les gens n’aient pas besoin d’aller chercher plus loin et qu’ils soient “rassasiés”. Il n’y pas besoin de creuser plus dans la vie privée de la personne connue, parce que celle-ci donne déjà, d’elle-même, certaines infos. 

Roméo Elvis : Ah ben c’est clair hein. Je pense que c’est pour ça qu’Angèle ne doit pas trop se soucier des paparazzis. En réalité, aujourd’hui, les artistes que nous sommes, on en livre bien assez sur nous à travers les réseaux sociaux. A travers Instagram… 

iHH™ Magazine : C’est une bonne technique pour avoir le contrôle sur son image. 

Roméo Elvis : C’est clairement le côté positif de cette mise en avant et de cette notoriété. C’est sûr. 

iHH™ Magazine : Je repense à cette période où Lomepal allait sortir Jeannine, et qu’en teasant le morceau ‘1000 degrés’ sur lequel tu es invité avec des photos de vous deux, les gens sont devenus fous en pensant qu’un album commun allait arriver. Tout prend tout de suite de grosses proportions, vous ça doit vous amuser de voir ça. Il suffit de regarder sur Insta, les milliers de pages qui existent dérivées de ton compte, ‘L’oreille de Roméo Elvis’, ‘Le pied de Roméo Elvis’… 

Roméo Elvis : Et puis il y a eu cette fameuse nouvelle cet été, où soit disant on attendait un bébé avec ma copine alors que j’avais juste posté deux photos, une avec un ciel bleu, l’autre avec un ciel rose. Les gens s’étaient amusés à sur-interpréter, donc on a joué aussi avec ça et j’ai jamais eu autant de retombées de presse !

iHH™ Magazine : C’est incroyable, au final il faut prendre ça à la rigolade. 

Roméo Elvis : Alors que tu vois, comme tu disais, sur l’album j’ai fait un morceau avec Damon Albarn… J’ai fait une tournée avec un budget d’un demi million, voire un million. On ne fait pas autant de bruit sur un vrai événement que sur une fake news à la con quoi, où on attend un bébé qui n’existe pas encore. 

iHH™ Magazine : Ça c’est le côté pervers des réseaux du coup, et tu en parles sur l’album. 

Roméo Elvis : Ouais ouais c’est ça, c’est super pervers. 

iHH™ Magazine : C’est une problématique ultra actuelle, les réseaux on est obligés d’y passer. Dernière question, est-ce qu’il y a une réédition de prévue pour ‘Chocolat‘, comme tu l’avais fait pour ‘Morale 2’ avec ‘Morale 2Luxe’

Roméo Elvis : Non ! Pas de réédition prévue pour l’album. Il y a déjà 19 morceaux. 

iHH™ Magazine : C’est déjà pas mal… 

Roméo Elvis : C’est beaucoup. En fait, c’est pas que je n’aime pas le concept de la réédition, mais le concept de trop donner je l’ai déjà assez fait. En réalité, la réédition que j’avais faite de ‘Morale 2‘, c’était une proposition de Barclay pour continuer à exploiter ‘Morale 2’ parce qu’on passait chez eux au moment où on sortait l’album. Je ne suis jamais parti dans l’idée de faire ça et voilà, en vrai je ne suis pas fanatique des rééditions. Il y a 19 morceaux, je trouve que c’est assez. J’ai bien aimé les morceaux qu’Antoine a sorti sur sa réédition (Lomepal qui vient de sortir ‘Amina’, réédition de son album ‘Jeannine’, n.d.l.r), j’ai hâte de voir ce que va sortir Angèle parce que j’ai pas tout entendu encore (réédition de son album ‘Brol’ appelé ‘Brol, La Suite’ à paraitre le 8 novembre n.d.l.r) mais je me vois moins le faire avec ‘Chocolat’, il y a déjà assez de contenu comme ça. 

iHH™ Magazine : C’est sûr qu’avec 19 morceaux, puis les clips qui accompagnent l’album…

Roméo Elvis : En fait, tu vois, il y a un peu ce truc de vouloir faire streamer les gens pour atteindre des chiffres et péter des records quoi. Sortir deux albums dans le mois, et du coup être super streamé pour pouvoir dire: “on a fait un gros démarrage !”. Ça ne m’intéresse pas, je kifferais savoir que je suis celui qui vend le plus la première semaine et tout mais bon voilà…

Le platine devrait arriver là, cette semaine pour “Chocolat”.

iHH™ Magazine : Bon, tu es déjà disque d’or avec ‘Chocolat‘ quand même ! 

Roméo Elvis : Oui oui, et le platine devrait arriver là, cette semaine. 

iHH™ Magazine : Génial, félicitations ! 

Roméo Elvis : Ouais c’est super, merci ! 

iHH™ Magazine : D’ailleurs, l’AccorHotels Arena, ça se remplit bien ?

Roméo Elvis : Franchement ouais ! Il y a déjà plus de la moitié des billets qui sont vendus ! 

iHH™ Magazine : Ce sera sûrement complet alors. 

Roméo Elvis : Je pense… On touche du bois mais c’est en bonne voie. 

iHH™ Magazine : C’est chouette, je te souhaite de faire complet également sur les autres dates de cette belle tournée.

Roméo Elvis : Merci beaucoup, c’est gentil.

iHH™ Magazine : Je te remercie Roméo d’avoir pris le temps de répondre à mes questions et on te retrouve le 6 novembre à la Rockhal !

Roméo Elvis : Avec plaisir ! Salut !

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