Rédaction : Sébastien Muzi
Photographies : Maude JNVX

Un show très attendu dans l’Est

L’impressionnant Open Air du Zénith de Nancy fait pratiquement complet ce soir pour la venue d’Orelsan. Près de 25 000 personnes se sont données rendez vous pour la venue du rappeur caennais. Le concert démarre à 21h avec l’appréhension d’un torrent pouvant s’abattre sur nos têtes à tout moment. Le ciel est noir et l’orage gronde.

Le concert s’ouvre sur le titre « Civilisation », outro de l’album éponyme, paru en novembre 2021. L’enchaînement avec le morceau suivant est rapide, on entre sérieusement dans le vif du sujet avec le titre « Du propre », dont le clip est sorti le 16 juin dernier. Il était évident que ce morceau, déjà très énergique sur l’album, allait faire l’effet d’un booster immédiat pour le public, qui se met à sauter d’un bloc.
 
Avec « Bébéboa », Orelsan et ses musiciens ont revu et adapté la production pour le live. L’aspect organique des instruments est magnifié grâce au talent de Manu Dyens (à la batterie), de Phazz (production et claviers), Skread (que l’on ne présente plus) et surtout ici Eddy Purple à la guitare, qui gratifie la fin du morceau d’un beau solo, entre funk et saturation. Ablaye ne manque pas à l’appel et prend un réel plaisir à ambiancer le public.

“La pluie”, plus réaliste que jamais !

En temps normal, on espère avoir le soleil de notre côté pour un concert en plein air au mois de juin, mais ce soir la pluie rejoint la partie au meilleur moment. Le titre « La pluie » en collaboration avec Stromae débute. Orelsan peut alors se sentir un peu comme à la maison, il faut bien reconnaître que nous ne sommes pas en reste en Lorraine et que la météo capricieuse fait partie du paysage local. C’est certainement un morceau qui parle davantage aux gens de la moitié Nord de la France (ou de la Belgique !).

La configuration globale du concert est massive, en plus d’un groupe complet sur scène, d’un écran central et deux latéraux, Orelsan est accompagné sur scène d’un caméraman. Cela tombe à point, le morceau « Défaite de famille » commence et ce dernier va jouer le rôle de l’oncle gênant qui filme n’importe quoi lors des réunions de famille. Le public se retrouve donc, malgré lui, à illustrer les portraits peu flatteurs dressés par le rappeur. Rien de tel qu’un artiste qui titille gentiment ses fans ! On note au passage que le groupe revoit ici aussi l’instrumentale pour caler la voix d’Orelsan sur les notes du titre « Humble » de Kendrick Lamar, hyper efficace !

Avec nostalgie et sincérité

Le groupe opte ensuite pour un mash-up d’anciens titres, le but est de défendre les nouveautés mais sans pour autant oublier certains titres toujours très efficaces et qui ont fait le succès d’Orelsan. C’est avec grand plaisir que l’on retrouve « Changement », « Jimmy Punchline », «  Si seul », «  Soirée ratée », « Courez courez », ou encore « Christophe » en collaboration avec Maître Gims. 

Lorsqu’Orelsan demande à Eddy Purple de lui donner les premières notes du titre « Jour meilleur » , le public reprend directement les paroles, c’est un de ces moments suspendus si particuliers en concert. C’est également le cas durant le morceau teinté de nostalgie « La quête », appuyé par un joli clip diffusé sur l’écran ovale placé derrière les musiciens.

Il faut d’ailleurs souligner qu’en termes de lien avec son public, Orelsan sait vraiment y faire. Alors qu’il demande si les fans ont vu le documentaire réalisé par son frère (et disponible sur Amazon Prime), le rappeur prend le temps, comme à l’accoutumée, de revenir sur les années qui se sont écoulées, sur les albums sortis, et particulièrement sur sa première date à la Boule Noire à Paris.

Civilisation Fighter

A ce propos, il rappelle qu’au début de sa carrière, le but était de recréer sur scène l’ambiance et l’agencement de l’appartement dans lequel il trainait et enregistrait avec son entourage. Il y avait donc une télévision avec une console pour pouvoir faire une partie de Street Fighter, posé sur un canapé. Désormais, les choses prennent une toute autre ampleur et Orelsan demande à deux fans de monter sur scène pour une partie de « Civilisation Fighter », un jeu de combat sur-mesure avec tous les personnages marquants de l’univers d’Orel.

Ce qui se passe sur scène est vraiment unique, Orelsan se retrouve à commenter une partie opposant deux fans qui incarnent respectivement Raelsan et Orelsan (version Civilisation) devant le décor de la série « Bloqués ». S’ensuit une séance de selfies sur fond de public, année 2022 oblige. Un moment de partage assez unique.

Orelsan sait parfaitement gérer le rythme de sa prestation, il plonge dans de beaux moments d’introspection grâce à des titres comme « Athéna » ou le sublime « Notes pour trop tard » en collaboration avec Ibeyi. Le public trouve également matière à s’agiter avec le percutant « L’odeur de l’essence », et l’évident « Basique » qui est un incontournable d’un live d’Orelsan au même titre que « La terre est ronde ».

Avec un concert parfaitement maîtrisé de bout en bout, Orelsan et son équipe démontrent une nouvelle fois qu’ils sont des immanquables de la scène rap francophone. Avec les années, les albums et les multiples projets (film, séries, etc.), ils se placent durablement en tant qu’artistes tout terrain et expérimentent systématiquement de nouvelles choses. Chaque concert est un beau story-telling, alternant moments de joie et de fête avec instants plus doux, de réflexions et de nostalgie pour toujours finir par une pointe d’optimisme.

Si la soirée était nuageuse, l’avenir d’Orelsan, lui, ne l’est pas.

« Tout se transforme, rien ne se perd. Ombre et lumière. »