Le Sénat étudie en ce moment même la proposition de loi pour la sécurité globale. L’article 25 de cette loi autorise les agents des forces de l’ordre en repos à porter leur arme de service au sein des lieux accueillant du public. Organisateurs de spectacles, groupes d’artistes et syndicats ont signé un communiqué de presse dans lequel ils demandent la suppression de cet article.
Texte par : Nicolas Sadourny
Cela fait plusieurs mois que le débat fait rage, depuis que la loi pour la sécurité globale a été proposée. Cette dernière donnerait entre autres le pouvoir aux forces de l’ordre de conserver sur leur personne leur arme de service, même en dehors du temps de travail.
Si cette éventualité a déjà beaucoup échauffer certains esprits, l’article qui a secoué le monde de la culture est bien le 25. Ce dernier prolonge en effet le droit donné aux membres des forces de l’ordre en repos de porter leur arme au sein d’ERP (établissements recevant du public).
Face à cet article, de nombreuses organisations culturelles ont élevé la voix. Un élément qui semblait cependant passer sous silence selon Aurélie Hannedouche, Déléguée Générale du SMA (syndicat des musiques actuelles) : “Cet article qui nous secouait tant était très peu médiatisé, il passait un peu inaperçu parmi les autres. Notre priorité était donc d’alerter l’opinion publique, le Sénat et les lieux concernés”. Parmi ces lieux, on retrouve notamment les salles de spectacle, bibliothèques ou bien les centres commerciaux.
Le SMA comprend des organismes de festivals, lieux privés, producteurs de spectacles ou encore des labels. En tout 500 organismes unis sous le symbole des arts musicaux dits “actuels”, ce qui comprend entre autres le rock, le rap ou encore l’électro.
“Les armes n’ont pas leur place dans les lieux culturels”
L’urgence s’est faite sentir quand la proposition de loi a été validée par la Commission le 03 mars. Alors avant que celle-ci soit présentée au Sénat deux semaines plus tard, le SMA a décidé d’agir : “Nous avons invité nos 500 organismes adhérents à écrire à leurs sénateurs et sénatrices pour faire part de leurs inquiétudes face à cette loi. Nous n’avons aucun soucis pour que les forces de l’ordre entrent dans nos établissements pendant leur temps de travail. Mais en temps de repos, les armes n’ont pas leur place dans les lieux culturels”.
14 grands organismes, dont le SMA, se sont ainsi joints pour signer un communiqué de presse dans lequel ils interpellent les sénateurs en les invitant à ne pas voter cette loi. Selon ce document, l’inquiétude provient de l’éventualité que ces armes puissent provoquer des situations dangereuses au sein de lieux publics, comme formulé dans le communiqué :
“Avec l’adoption de l’article 25, la présence d’armes au sein d’ERP et donc de lieux culturels serait facilitée voire banalisée, et nous y voyons un grave danger. En effet, notre expérience au plus près du terrain nous permet d’identifier des risques extrêmement dommageables et bien plus importants que les vertus illusoires de cet article 25 : mouvements de panique à la vue d’une arme, falsification de cartes de police pour introduire des armes, risques de débordements liés à l’environnement festif et à la présence d’alcool, etc”.
Cet article, Aurélie Hannedouche le juge par ailleurs peu pertinent : “Les mesures de sécurité sont déjà très drastiques, surtout depuis les attentats de 2015. Le budget sécurité a énormément augmenté, il y a plus d’agents et plus de fouilles à l’entrée des lieux culturels. Et ce niveau de prévention est évidemment validé par les forces de l’ordre, on ne s’auto-évalue pas”.
Plusieurs amendements de suppression contre l’article 25 ont été portés par différents partis politiques “C’est la preuve que ce n’est pas une question de Droite ou de Gauche mais bien une question de société”, selon Mme Hannedouche. La Ministre de la Culture a également partagé son soutien pour la suppression de cet article.
La proposition de loi a déjà été validée par l’assemblée nationale et est actuellement examinée par le Sénat depuis ce mardi 16 mars. Si l’action des organismes culturels porte ses fruits et que l’article est rejeté par les sénateurs, ce sera à une commission mixte paritaire composée de députés et sénateurs qu’incombera la tâche de trancher la question pour de bon.