Depuis quelques années déjà, le rap se féminise un peu, la province prend plus de place et le game est en constante évolution. Almä Mango a pris le temps de faire les choses, de travailler son Rap tant en studio que sur scène. Après avoir daté tout l’été, la voici qui dévoile son nouveau projet : “Flamme” !

Interview : La Rédaction

Photo : Alex Sorin

iHH™ : Qui est Almä Mango ? Et peux tu nous en dire plus sur ton nom ?

ALMÄ MANGO : Je suis une rappeuse basée à Bordeaux depuis 4-5 ans maintenant. Almä, ce sont les deux premières lettres de mon nom et les deux premières lettres de mon prénom. Mango, ça représente mes origines des Antilles et mon fruit préféré quand je suis chez ma Mamie en Guadeloupe.

iHH™ : Tu as eu un coup de projecteur par le biais de “Rappeuses En Liberté”. Comment se sont faites les choses ?

AALMÄ MANGO : Quand la promo de la première édition de Rappeuses En Liberté est sortie, j’ai une quinzaine de potes qui m’ont conseillé de participer. J’ai envoyé mon dossier de candidature et j’ai fini dans les 10 dernières sélectionnées sur 300 dans toute la France ! Trop honorée. L’aventure a été magique ! Autant de rencontrer 10 autres rappeuses (ce qui m’était jamais arrivé auparavant), que de rencontrer toute une flopée de professionnels du milieu pour me former durant 75 heures ! Un vrai événement marquant sur mon chemin.

iHH™ : D’ailleurs, qu’est ce qui te met le pied dans le rap ? Et pourquoi le rap et pas autre chose ?

ALMÄ MANGO : Étant petite, j’étais rivée sur des chaînes musicales (surtout américaines) qui me faisaient rêver à l’époque ! J’ai toujours su que j’avais plein de choses à raconter, mais malheureusement pas la “voix” nécessaire pour. J’ai commencé naturellement par le rap et sa rythmique des mots, par manque de confiance ! Cela me paraissait plus instinctif et plus “facile”, plus abordable. La mélodie et les cours de chant sont venus après et maintenant je mêle tout ça sans plus aucun complexe.

iHH™ : Ensuite tu as fait ton premier projet “Nuit Blanche”. Dans quel état d’esprit es-tu avant sa sortie et comment tu te projettes à ce moment-là ?

ALMÄ MANGO : Les morceaux de “Nuit Blanche” sont un combo de toutes les chansons que j’ai pu créer durant 5 années de recherche artistique depuis mes débuts. J’étais surtout très émue de les rassembler enfin dans un seul et même album et de les présenter au public. J’ai toujours écrit dans ma petite chambre sur les prods de mon mari (Aïdo.Lov – beatmaker et Ingé-son), en gardant le rêve lointain de les sortir un jour. Donc très émue de voir cet aboutissement le jour de la sortie du projet. 

iHH™ : Le rap feminin, depuis l’époque de Diam’s, existe mais ne perce pas vraiment. Quel regard portes-tu sur ce, peut être, manque de représentation ? 

ALMÄ MANGO : Pour moi, le “rap féminin” n’est pas un style de musique. Tout comme il n’existe pas de “rap masculin”, ni de “pop féminine” ou de “rock masculin”… il faudrait que les femmes soient plus représentées dans le rap (“tout court”). On sépare encore beaucoup trop les genres, comme si le rap était un sport, contrairement aux autres styles musicaux. De plus en plus, les choses avancent et s’ouvrent. Mais bon, je me sens encore souvent très seule dans les programmations d’événements rap.

iHH™ : De même, le rap bordelais existe depuis les débuts du rap français, mais comme beaucoup de rap en provenance de province, il a du mal à s’imposer sur la scène nationale. Est-ce quelque chose que tu calcules, avec lequel tu composes ?

ALMÄ MANGO : Je suis originaire de la région parisienne, et basée à Bordeaux depuis 4-5 ans maintenant ! Je n’ai jamais eu autant d’occasions que depuis que je suis arrivée sur les terres bordelaises ! Je pense que c’est beaucoup plus facile d’être identifiée en province que sur la région parisienne, où on peut se trouver un peu noyée dans l’offre et la demande. Après c’est une autre paire de manches de passer de la province à Paris, mais le chemin se fait malgré tout ! La route des festivals cet été m’a beaucoup aidé à conquérir un public parisien “en vacances”.

iHH™ : Avant ce second opus, tu as fait un EP, “Feux”. L’objectif était de te remettre dedans ? Ou c’est un concept que tu souhaitais mettre en avant ? Ou autre chose encore ?

ALMÄ MANGO : J’ai commencé par me faire connaître sur les réseaux grâce à des freestyles vidéos, qui m’ont aidé à engranger des followers et trouver de nouvelles inspi pour de futurs morceaux. C’était important pour moi de garder cette touche “entertainment” que j’aime tant dans le rap ! Les “Feux” symbolisent aussi les étapes par lesquelles je suis passée pour m’affirmer dans ce milieu et arriver à mon 2nd projet. “Feu Rouge” : les doutes, “Feu Orange” : la découverte de mes capacités, “Feu Vert” : l’affirmation.

iHH™ : Cet été, tu as fait le tour des festivals. Tu penses tes titres pour le live ou alors tu les adaptes pour le show ? D’ailleurs, as-tu pu tester quelques nouveaux titres dans ton set ?

ALMÄ MANGO : Je pense toujours mes titres comme des œuvres à part entière, qui doivent avoir un sens et une place précise dans un projet global. L’adaptation des titres pour le live est un travail à part entière ! Je suis suivie sur la route des festivals par Laspla qui a travaillé sur les arrangements de tous les morceaux Live et qui me suit à la technique sur la route. En effet, j’ai tourné tout l’été avec les nouveaux morceaux de mon second album pour les “tester” en conditions réelles et ainsi voir ce qui marchait le mieux pour le développement du projet !

iHH™ : Ton nouvel album vient de sortir, comment l’as-tu préparé, pensé ? Peux-tu nous expliquer ton processus créatif ? Tu commences avec la prod°, le thème,  une mélodie, un lyrics…

ALMÄ MANGO : Mon nouvel album regroupe des titres, autant tirés de mes freestyles vidéos postés (ceux qui ont le plus marché, que j’ai repris, réarrangés et continués), que d’expériences et de constats divers. C’est une œuvre que j’ai pensé dans sa globalité, contrairement au premier album qui est venu petit à petit, au fil de ma création. Je n’ai pas de processus de création fixe ou de recette magique, mais j’aime beaucoup, et de plus en plus, bosser la topline avant d’y apporter des mots. Le thème est souvent ce qui arrive en premier (histoire de me poser un cadre et des contraintes) mais encore une fois, pas d’automatisme.

iHH™ : Par ailleurs, sur cet album, tu restes en solo tout au long de tes titres. Labsence de featuring est un choix ?

ALMÄ MANGO : J’ai la réelle volonté d’apporter des feats. dans mes morceaux, mais j’ai l’impression de devoir d’abord me trouver et montrer qui je suis avant de pouvoir inviter d’autres artistes sur mes créations. J’ai des idées en tête, qui viendront peut-être plus tard… Affaire à suivre !

iHH™ : Toujours concernant le processus de création, y a-t-il eu des titres plus compliqués à aborder, à écrire… à poser ?

ALMÄ MANGO : Oui, bien sûr ! Les titres comme “Flamme” ou “Solo” sont pour moi les plus compliqués à aborder, car les sujets sont assez personnels et profonds ! L’émotion à mettre dans les textes, mais aussi dans les prises de voix est très importante et ne peut pas être feinte !

iHH™ : Sur ce projet, il y a un titre ou plus que tu trouves plus représentatif ? Dont tu es plus fière ?

ALMÄ MANGO : Je suis très fière de tous les titres, c’est presque comme devoir choisir entre ses enfants, chacun a une place particulière dans mon cœur et même s’il y en a que j’ai décidé de mettre en avant, au travers de clips, ils restent tous partie prenante de mon œuvre.

iHH™ : Au travers de tes morceaux, on sent une véritable envie de kickage et, en même temps, tu retournes les codes du rap sur “Que Le Game”… Tu penses que ces codes doivent changer ? Être moins pris au sérieux parfois ?

ALMÄ MANGO : Oui, en effet, j’observe ce monde depuis un petit moment maintenant et je pense que c’est au moment où on s’en détache le plus possible, qu’on devient objectif sur les vrais enjeux. L’idée c’est pas de coller à une image déjà toute faite, mais de créer ses propres règles dans ce jeu et de créer sa propre image !

iHH™ : “Caliente” en s’arrêtant au titre aurait pu être un simple morceau d’été sans fond. Pourtant, tu reviens sur tes origines guadeloupéennes et développes du fond/thème… On en revient aux codes du rap : tu as toujours besoin de mettre du fond malgré la possibilité de simplifier le propos ?

ALMÄ MANGO : Oui, je pense que c’est important de toujours écrire sur un thème ! L’égotrip est très (peut être trop) présent dans le rap aujourd’hui, mais de plus en plus vide à mon avis… Je pense que c’est une richesse que l’on doit au public ! Pas simplement parler de soi, mais de ce qui fait que tout le monde peut se reconnaître dans une chanson. L’envie de s’évader dont je parle dans « Caliente » est une aspiration universelle et motivée par un vrai fond (les racines, ses ancêtres, ses bases…).

iHH™ : Derniers mots : quels arguments pourrais-tu nous donner pour finir de convaincre de nouveaux auditeurs ?

ALMÄ MANGO : On m’a dit un jour, en fin d’une interview : “En somme, Almä Mango c’est du développement personnel, nan ?!” J’ai trouvé ça génial.