Sheldon a dévoilé le 26 juin 2020 son nouvel EP, FPS. Une façon d’appréhender un peu plus son univers complexe et blindé de références pop culture les plus chinées du game. L’artiste aux multiples casquettes maitrise la conception de sa musique du son au visuel en passant évidemment par les textes.
Comme sur RPG, EP sorti en 2018, Sheldon a décidé de s’associer avec Yung.Coeur côté prod°. En fait, Ces EP sont aussi bien ceux de Sheldon que ceux de Yung.Coeur. Tous deux issus de la très renommée 75ème Session, c’est pour notre plus grand plaisir qu’ils s’unissent sur ce deuxième projet, FPS.
Interview : Marie Sineux
Photos : Michel Rubinel
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Je n’avais pas d’attente comme si je sortais un album, c’était vraiment pour faire plaisir à ma communauté, pour avoir un petit truc à sortir et pour pas laisser trop d’inactivité avant le deuxième album.
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On savait qu’on ferait FPS, on savait même que ça s’appellerait FPS, mais on ne savait pas quand est-ce qu’on allait le faire. On ne pensait certainement pas le faire à ce moment-là. Ce n’était pas du tout au programme. C’est vraiment le confinement qui nous a amenés là. Moi j’étais chez moi, lui il était chez lui. Moi j’ai mon petit stud chez moi, Yung.Cœur a son petit stud chez lui. Comme on faisait rien, on s’est dit que c’était le moment pour le faire. Lui il est toujours assez occupé parce qu’il s’occupe d’Inspire et de M le Maudit. moi j’ai ma vie d’ingé son, plus ma vie de rappeur. C’est compliqué de trouver le moment pour faire un EP, où on est tous les deux bien disponibles pour le faire. Du coup c’était le bon moment. Ça a vraiment été un concours de circonstances. On s’est appelés, mais même pas pour ça, en mode « tu fais quoi aujourd’hui ? – Bah rien je galère, toi tu fais quoi ? » Je lui ai dit « bah rien, vas-y envoie des prod, c’est peut-être le moment d’essayer de refaire des nouveaux morceaux. »
Ça a été hyper fluide : l’écriture et l’enregistrement du projet ont été faits sur deux semaines. Et après c’était cool parce que j’avais mon matos chez moi, j’ai eu le temps de le mixer. Ce sont Les Gars Laxistes qui ont fait le clip de FPS. Ils étaient dispos aussi donc ils ont fait le clip direct. Ça a vraiment été un heureux concours de circonstances je dirais.
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Les Gars Laxistes c’est des ouf. Ils sont hyper balaises. En fait le clip ce qui est ouf c’est que c’est pas un clip, c’est un jeu qu’il a créé dans Unreal Engine qui est une engine de développement de jeux vidéo. Il a fait un jeu et il a screen une séquence de jeu dans le jeu. Donc en fait pour faire ce clip il a dû créer un jeu vidéo. Donc ouais, il est archi déter.
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Non, pas du tout. Le jeu vidéo de Lune Noire à la base c’est moi qui l’ai fait. J’ai fait reprendre le truc en cours, parce que je n’avais pas de temps. J’avais l’album, il fallait tout gérer. Du coup j’ai refilé le jeu que j’avais commencé à un pote à moi. Le jeu vidéo de l’album on l’a fait avec un logiciel qui s’appelle “RPG maker” qui permet de faire des RPG comme ça assez facilement. Donc c’était moins de boulot entre guillemets que ce clip-là. Là il y a une équipe qui bosse en secret sur un vrai jeu vidéo Lune Noire qui sortira mais complètement hors du processus Lune Noire. Ça va être un vrai jeu, là c’est vraiment un taf de dingue ce qu’ils font, ils sont 10.
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Ouais clairement en plus là ça s’est fait d’une façon trop cool. C’est juste des mecs qui ont kiffé le projet qui m’ont dit “on est en école de jeux vidéo à Lyon, on a trois ans pour faire un jeu, c’est notre projet d’école.” Donc ils ont commencé il y a un an et demi, il leur reste encore un an et demi à faire. Moi je n’ai rien demandé, c’est les mecs qui m’ont appelé en me disant “on est trop déter de faire un jeu sur l’album.”
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Ouais. C’est faux ! Je ne suis pas du tout dans mes plans de développeur. Je m’amuse avec ça parce que je kiffe de ouf les jeux vidéo, c’est grave ma culture. Je suis beaucoup l’actu interne des jeux vidéo, bien plus que je joue, parce que j’ai moins de temps maintenant en fait. Je joue encore un peu mais beaucoup moins que quand j’avais 15 ans et que je jouais 50 heures par semaine. Je kiffe de ouf les jeux vidéo, c’est grave dans ma culture. Moi je ne développe pas du tout, par contre j’ai des potes qui font ça.
Je kiffe le truc, je m’y intéresse beaucoup, je fais des choses sur Unreal, sur Unity. Je fais mes petits trucs mais je ne développe pas de jeux. Je pourrais grave kiffer et c’est un métier qui pourrait me chauffer de ouf. Mais je suis obligé de faire un choix, je ne peux pas tout faire. Je fais ingé son, beatmaker, je fais du dessin… Je suis déjà coincé entre 20 000 trucs, si je commence à rajouter mon envie de faire des jeux vidéo là-dedans, ça ne va pas être possible.
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J’ai commencé une école. J’ai arrêté à la fin de la première année parce que ça tombait quand on était en train d’ouvrir le premier studio de la 75ème session dans le 15ème et il fallait que je fasse un choix. C’était soit les cours soit le studio. J’avais l’impression que je me développerais mieux, que je deviendrais beaucoup plus vite un ingénieur du son et que je pourrais travailler beaucoup plus vite dans ce milieu si j’allais direct avec moins de compétences sur le terrain. C’était ce qui me paraissait logique. Au début c’était un peu risqué parce que je ne savais pas du tout si j’allais y arriver. Ça a été un peu compliqué avec la famille, tu sais, tu expliques que tu arrêtes les études. En plus je n’étais pas l’élève le plus studieux mais j’étais un bon élève, j’avais eu mon bac avec mention, j’avais fait mes trucs à peu près correctement. T’arrives de nulle part et tu dis “j’arrête mes études et je vais m’enfermer avec mes potes dans un studio dans le 15ème “, en plus ça correspondait à la période où je suis parti de chez mes parents pour vivre tout seul. Donc ça a été un gros pari mais je ne regrette pas. Ce que j’ai appris au niveau du métier en studio est bien plus précieux que ce que j’ai appris en un an de cours.
Il y a aussi des très bons ingés qui sortent de cours, c’est des processus différents. Mais moi pour ce que je voulais faire ça coïncidait mieux. J’avais de la chance parce qu’on avait déjà le collectif. J’avais déjà des gens avec qui j’avais envie de travailler qui avaient envie de travailler avec moi même si je n’étais pas le meilleur. Ils étaient prêts à me faire confiance pour que j’évolue avec eux. Quand tu as cette opportunité-là, c’est plus engageant, t’es vachement plus intéressé par ce que tu fais quand tu es en studio à faire ta propre musique que quand tu es en cours à écouter quelqu’un qui t’explique que peut-être tu pourras faire ta musique dans quelques années. Mais je ne dis pas qu’il ne faut pas faire d’école ! C’est mon parcours à moi.
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Sur RPG on a tout fait ensemble. Dans les deux cas, c’est lui les prod°. Yung.Cœur à la base c’est le premier stagiaire que j’ai eu au Dojo. On est quand même très très lié dans la façon de faire de la musique, on utilise les mêmes logiciels, on a la même méthodologie. Donc c’est lui qui fait les prod°. RPG c’est lui qui l’a mixé mais j’étais derrière, on l’a fait ici {au Dojo, ndlr} et on était tout le temps ensemble pendant tout le processus créatif. Sur FPS il a fait les prod°, il m’a envoyé les prod°, j’ai rapé dessus, mais derrière c’est moi qui ai mixé et masterisé tout le projet. Donc forcément il y a plein de trucs que j’ai modifié dans les prod°, plein de trucs que j’ai changé qui font que pour moi ce n’est pas vraiment des coprod parce que toutes les intentions de départ, toute la sauce du projet elle est faite par Yung.Cœur.
Après, fatalement au moment où j’arrive à l’étape du mixage, où en fait je vais changer des éléments, je vais changer des synthés, je vais rajouter des trucs, et particulièrement au vue du fait que c’était le confinement et qu’on ne pouvait pas se voir, pendant toute cette partie-là moi j’étais un peu en autonomie, je ne pouvais pas le consulter à chaque fois que je faisais un truc. Je faisais mes sessions de travail et je lui envoyais les exports à la fin de la journée. Donc en fait dans un sens c’est quand même une collab à deux. Même si toute l’énergie et toute la matière artistique dedans c’est lui quoi.
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Pour RPG et FPS, pour moi ce n’est pas des EP de Sheldon où il y a un beatmaker qui a fait toutes les prod°. Pour moi c’est des EP de Yung.Cœur et Sheldon. Ça lui appartient autant à lui qu’à moi. Sur FPS, s’il m’envoie un message en me disant qu’il n’aime pas un couplet, d’office je le réécris sans me demander si je suis d’accord avec lui. C’est notre disque à nous deux, on fait les trucs ensemble, on fait les choix ensemble. Du coup forcément ça amène une unité le fait que ce soit un beatmaker unique. Mais en fait l’unité elle est amenée par le fait que c’est autant son projet que le mien, du coup il n’y a pas du tout ce rapport que tu peux avoir dans le rap où c’est très souvent le rappeur qui lead son truc. Là je suis à peu près aussi dépendant de ce qu’il pense des morceaux qu’il l’est de ce que je pense des morceaux. Je pense que l’unité elle vient surtout de là, plus que du fait que ce soit le même beatmaker, c’est qu’il a vraiment les deux pieds dans le truc.
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La cover de RPG, c’était le Château dans le ciel de Miyazaki, c’était plus ça la référence. Il y allait avoir le château de Lune Noire aussi, je le savais déjà à ce moment-là. Pour FPS on voulait ramener le truc un peu plus moderne, l’îlot flottant qu’il y a derrière c’est redessiné et réinterprété par Vagab qui a fait la pochette, mais c’est Zalem, qui est la ville flottante dans un manga qui s’appelle Gunnm.
En gros, il y a une ville flottante au dessus de la ville. On a vraiment repris ça. Mais c’est pareil, c’est des trucs qui sont hyper codés pour des gens qui ont les mêmes références que moi.
J’essaye toujours de faire en sorte que ce soit quand même de la musique et que tu puisses l’écouter si tu n’as lu aucun des mêmes trucs que moi, joué à aucun des mêmes jeux vidéo. Mais dans RPG et FPS particulièrement il y a cette volonté de coder le truc et de faire plaisir à tous les gens qui ont grandi avec les mêmes références que moi.
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Je ne sais pas si c’est plus facile, c’est différent. Je fais les deux en fait. Les EP que j’avais fait avant RPG étaient plus personnels, je m’engageais plus dans ce que je disais. L’album que je suis en train de faire là aussi c’est beaucoup plus moi qui parle de moi. Tu dis les mêmes choses mais quand tu utilises des références, tu peux dire en très peu de mots quelque chose de beaucoup plus compliqué, mais effectivement qui ne s’adresse que aux gens qui ont la référence. Si tu dis “je suis un mec gentil” et “je suis un mec gentil comme Naruto”, l’implication pour les mecs qui ont lu Naruto est beaucoup plus forte. Parce qu’en fait ils ont accès à quelque chose de beaucoup plus dense. Je me sers vachement des références pour ça, pour pouvoir dire des trucs d’une façon hyper condensée, pour pouvoir dire des trucs plus larges, et je pense que c’est ça qui touche les gens. Je fais un choix quand je fais ça, celui de parler à moins de gens, de dire plus à certaines personnes, d’évoquer rien du tout à ceux qui sont complètement hors de ça. Je n’ai pas d’aspiration à faire que ça. Mais je n’ai pas le sentiment que ce soit plus facile de parler de moi, c’est une autre façon de parler de moi. Ce sera très différent dans les prochains projets.
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D’y échapper oui et non. J’arrive à 29 ans avec une vie qui m’empêche en fait d’être plongé dans cette VR. Je ne joue pas tant que ça aux jeux vidéo. J’ai moins de temps pour lire, j’ai moins de temps pour regarder des séries. Je le fais quand même mais beaucoup plus comme une personne normale qu’il y a une dizaine d’années où j’étais beaucoup plus un NERD. C’est surtout un moyen de représenter tous les gens pour qui c’est le cas en fait. On n’est pas juste des geek ou des mongols devant des ordinateurs, on est aussi des gens qui ont une vision du monde qui nous entoure et c’est aussi un moyen de rejeter, un moyen de vivre avec des trucs qui nous font chier.
Je suis issu d’une génération où jouer aux jeux vidéo, lire des mangas ou des BD c’est encore considéré comme un truc de geek. Aujourd’hui c’est différent, tout le monde le fait, il y a une hype. Je suis issu d’une génération où quand tu es avec ton tome 8 de Bleach dans la cours de récré t’es juste le mec chelou qui ne veut pas jouer au foot.
Je suis forcément marqué par ça, c’est l’histoire de mon adolescence. En plus j’ai toujours été pris à la fois par le rap, le graffiti, et ces choses qui me mettaient dans la case des mecs un peu geek. Je passais très vite de l’autre côté avec des plus grands que moi, à sortir dans la rue le soir. J’ai toujours été dans les deux trucs. C’est quelque chose dont j’ai pu souffrir et j’avais du mal à faire les passerelles entre les deux types de personnes. Il y avait les personnes avec qui j’allais jouer aux jeux de rôles, lire des mangas, parler du dernier animé et les gens à côté, du rap et du graffiti. Même pour les meufs à l’adolescence, j’étais le mec dans le fond de son RER D qui rentre du lycée en lisant des mangas en ne regardant pas trop au-dessus de son manga. Donc je pense que je suis marqué par ça. “Je préfère rester dans la VR” ça veut dire pour tous les gens qui l’ont pas encore capté, même si je pense qu’ils ne sont plus beaucoup, que ce n’est pas juste une activité qui détruit le cerveau, c’est aussi une activité qui le développe.
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Quand t’es complètement en indépendant, que t’as pas de maison de disque, que ton label c’est toi qui l’a créé, ça veut dire aussi que pendant 10 piges tu galères à faire l’acquisition de cette autonomie. Pour moi c’est un moyen de dire “maintenant on fait ce qu’on veut, on s’en fout.” Si j’ai envie de faire un album je fais un album, je n’ai pas besoin d’attendre que quelqu’un veuille me filer 30 000 balles d’avance. C’est un truc un peu orgueilleux hein, mais c’est histoire de dire que maintenant on va faire nos trucs, on n’a pas vraiment besoin qu’on nous donne l’autorisation de les faire. Il y a aussi cet aspect : je m’en fous que ça marche, je n’ai pas forcément la volonté de devenir un rappeur top 1 des charts. Je n’ai même pas forcément la volonté de rentrer un disque d’or. Moi j’ai juste envie de faire mes disques, que ça fasse plaisir aux gens qui aiment ça, donc bien sûr s’il y a toujours plus de gens qui aiment ça c’est tant mieux. Mais c’est un moyen de dire qu’on s’est fait chier à avoir cette autonomie, maintenant qu’on l’a on va en profiter on va faire ce qu’on aime vraiment et on va pas s’amuser à faire des trucs consensuels alors qu’on s’est fait chier pendant 10 ans pour pouvoir faire exactement ce qu’on voulait.
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J’ai un jeu qui est pour moi un graal du jeu vidéo mais en plus c’est presque pour des raisons philosophiques plus que gaming pure. Moi je suis ultra fan de Dark Souls et des jeux type Dark Souls parce que ce sont des jeux qui sont vraiment dans une niche. Quand j’allume un Dark Souls je me sens comme un auditeur quand il met un disque de Sheldon je pense. Tu sais c’est un jeu où on ne t’explique rien. On ne t’explique pas comment ça marche. Il n’y a aucun didacticiel, tu vas galérer, ça va être dur d’accès. Mais par contre si tu arrives à accéder au truc, ce que tu vas récupérer ça va être bien plus précieux que si tu finis Assassin’s Creed comme la moitié de la planète tu vois. Du coup je suis grave attaché à ce jeu-là pour ces raisons-là qui sont celles de dire que parfois quand tu veux un truc il faut un peu le chercher. Je pense que dans les disciplines artistiques, et dans tout en fait, tout n’est pas du tout cuit, et si tu t’arrêtes à la première rangée de ce qu’on te donne, tu te contrains toi-même à peu de richesses. Ça ne veut pas dire que je n’aime pas la première ligne. Je vais grave kiffer un jeu vidéo hyper mainstream qui est hyper connu. Je peux grave kiffer faire un Fifa par exemple. Dans la musique c’est pareil. Je peux grave me prendre à fond pendant deux mois à écouter le même track de Jul tous les jours et le trouver incroyable, mais j’aime bien qu’on puisse aller plus loin dans le truc.
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Non. Je pense que j’écoute des trucs de golmons, j’écoute de tout. Je peux écouter dans la même journée un album de Jul, un single de Soso Maness. J’écoute la musique qui me plait. Si ça me parle, je ne me pose même pas la question d’où ça vient ou de comment ça a été fait, de si c’est commercial ou mainstream. En plus je trouve qu’aujourd’hui ça ne veut tellement plus rien dire. Quand toute la musique était tenue par les couilles par les majors ça avait éventuellement un sens dans les années 90 de dire “il y a le vrai rap, il y a le rap de major”, bien que dans le fond j’ai toujours trouvé ça un peu pourri ce truc-là. Mais aujourd’hui je trouve que ça ne veut plus rien dire.
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Ouais le mec il fait tout. Et puis au-delà de ça moi je trouve qu’il faut ça tu vois. C’est archi satisfaisant. T’es sur l’autoroute pour partir en vacances sur la côte d’Azur, je ne suis pas sûr que tu aies envie de te mettre un gros Sheldon dans la tronche qui te raconte la pluie et les jeux vidéo. Moi je pense qu’il faut de la musique pour tout, pour tous les moments de la vie. Je n’ai pas du tout d’élitisme musical. J’essaye de ne pas en avoir. Il y a qui je suis moi en tant qu’artiste et qui je suis dans la vraie vie. Donc je vais défendre des positions et faire de la musique qui est la musique qui me paraît pertinente. Pour moi ça ne doit pas m’empêcher d’écouter des trucs qui n’ont rien à voir à côté.
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Bah ouais, comme je te disais tout à l’heure. C’est un grand collectif, on est plein. On est tous très potes. Le truc de la famille du Dojo c’est un terme qui a souvent été repris, parce que c’était comme ça qu’on l’appelait nous. Ça a fini par atterrir dans les médias parce que c’était nous qui appelions le truc comme ça à la base. On est une famille, mais on est comme toutes les familles. On s’engueule, on s’assemble, on se désassemble. Il y a des nouvelles personnes qui arrivent, il y a des anciennes personnes qui partent. C’est en mouvement. On est une famille, on n’est pas une secte. On n’est pas forcément hyper figés dans le temps.
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Ça c’est le Dojo. Tu mets 20 artistes qui gravitent autour d’un studio, qui se croisent tout le temps, c’est couru d’avance. C’est couru d’avance que si tu fais ça avec n’importe quels 20 artistes, tu les fous 6 ans au même endroit à tous se partager un lieu de création, ils vont forcément s’influencer les uns les autres, une certaine unité va forcément ressortir.
Nous, à la base, on a l’impression d’être des rappeurs très différents. Si tu prends Limsa, Hash, Sopico et moi par exemple : on est très différents et je pense que même la musique qu’on fait est très différente. Maintenant comme on est tout le temps ensemble bah forcément tu peux retrouver un peu de chacun dans la musique de chacun.
Je pense qu’un lieu comme ça, comme le Dojo, tu ne peux pas y être bien si tu ne partages pas un certain nombre de valeurs communes. Du coup les valeurs communes elles sont tenues par le simple fait qu’on soit ensemble. Il y a aussi plein de gens qui sont venus plein de fois ici, qui sont nos potes et qu’on aime bien mais qui ne sont pas dans le truc parce que le mode de fonctionnement ici ne leur convient pas. Et je le comprends très bien. D’ailleurs même ce mode de fonctionnement tu peux y adhérer un temps et ne plus y adhérer. Tu peux avoir à un moment envie d’être en collectivité et à d’autres moments moins. Moi tu vois ça fait un an que je suis parti d’ici parce que j’avais aussi envie au bout d’un moment d’avoir une vie privée, une vie de couple, un appart où je rentre et je suis dans mon espace. Mais du coup, ce lieu si tu le fréquentes régulièrement, tu es obligé d’adhérer à plein de valeurs qui nous tiennent les uns les autres implicitement. Et du coup c’est ça en fait qui ressort après pour les gens je pense.
Et puis nous on a vachement montré l’aspect interne du Dojo. Que ce soit la websérie de Nova, que ce soit même dans le travail qu’on a fait. Le travail que Les Gros Sourcils et Yveline ont fait en venant faire le documentaire ici c’est un truc immersif en fait. Elle n’est pas venue 3 jours dans l’année. Elle est venue un an, trois fois par semaine. Donc même pour faire un documentaire sur nous il faut que tu adhères à nos valeurs communes d’une façon ou d’une autre. C’est pour ça que ça se ressent et que nous on a toujours été amenés à être assez transparents. Les gens disent qu’on est assez secrets parce qu’il y a des personnes qui ne montrent pas leur visage dans l’équipe. Parce que moi je ne suis pas un mec qui va partager 50 photos de lui en story. Mais en fait on est quand même une des équipes dans laquelle tu sais le plus ce qui se passe si tu es de l’extérieur. Il y a plein d’équipes de gens tu ne sais pas ce qu’ils font. Nous si tu cherches à savoir où on est, le lieu, même l’adresse tu peux la trouver assez facilement. Je pense que c’est ça qui rend le truc un peu sacré pour les gens.