Rédaction : Sébastien Muzi
Photographies : Maude JNVX
En ce début bien automnal du mois d’octobre, L’Entrepôt d’Arlon propose un plateau rap qui a de quoi faire transpirer la foule : D-Track, Younès et Medine ! L’événement affiche sold-out, retour sur une bien belle soirée.
Medine Multitude
Le collectif de D-Track, accompagné de Ganjo Solo, se charge de masser le public devant la scène. On remarque d’emblée une diversité marquante au sein de la foule, les générations se côtoient dans la bonne humeur, on voit des groupes d’amis, des trentenaires, des plus jeunes, des moins jeunes, des parents avec leurs adolescents, le plateau de ce soir parvenant à intéresser une multitude de fans.
A 20h30, c’est au tour de Younès de monter sur scène. Le rappeur a récemment bénéficié d’un coup de projecteur grâce à sa présence solaire dans la série « Drôle » sur Netflix. Force est de constater que le personnage de Nézir, qu’il y défendait, tient énormément de Younès lui-même. Le rappeur débarque sur scène avec un sourire qui court d’une oreille à l’autre, armé d’une bonne vibe qui se propage à toute l’assemblée.
Identité remarquable
Après deux excellents projets sortis en 2020 : « Même les feuilles » et « Bientôt à la mode » qui figuraient des titres comme : « L’effondrement », « Beaux quartiers » ou encore « Le monde est virtuel » produit par Rilès, Younès a su prendre le temps nécessaire pour mûrir un album qui, à l’heure où nous écrivons ses lignes, sort dans 4 jours (vendredi 7 octobre) : « Identité remarquable ».
Les chanceux présents ce soir à Arlon découvrent donc des titres en totale exclusivité ! Younès embarque pour 4 dates au mois d’octobre afin de défendre la nouvelle galette et de peaufiner son live. La mini-tournée passe par la Cigale le 12 octobre (à l’occasion du MaMa Festival) et le Casino de Paris le 19 avant de conclure au Havre le 23.
On parlait d’aisance sur scène, et il faut bien y revenir car Younès communique avec une aisance déconcertante, chaque titre est savamment présenté, mis en contexte et son backeur est très efficace. Le set est relativement court mais on y trouve tous les ingrédients nécessaires à une prestation remarquable. La plume du rappeur est fine, il aborde de nombreux sujets, certains plus légers que d’autres, mais toujours avec des touches précises d’introspection.
On retrouve “J’me rappelle“, qu’on attendait d’entendre en live. On traverse donc des galères, des souvenirs de famille, des questionnements et des projections sur le fait de devenir, un jour, père. On a hâte de réécouter les nouveaux titres dès vendredi et de retrouver Younès sur scène, d’ici quelques temps.
Medine Belgique
Le public attend désormais de pied ferme l’arrivée de Medine sur scène. La scénographie allie, comme à l’habitude sobriété et efficacité, les claviers de Redzol sur la droite, le batteur Félix sur la gauche.
On retrouve sur scène un Médine plus en forme que jamais, plein d’humour et enchainant les punchlines. Accompagné d’Alivor et avec près de 20 ans de carrière derrière lui, le plus célèbre des artistes du Havre maitrise la scène. Pour cette nouvelle tournée, à l’occasion de la sortie de l’excellent « Médine France » (Mai 2022, Din Records), Médine revient sur sa carrière et mélange les nouveautés aux hits qui ont fait son succès.
On entend enfin sur scène les bangers du nouvel album : « La puissance du port du Havre », mais aussi « Allons Zenfants », « La France au rap français ». Les morceaux sont puissants, le public est chaud et très réactif. Pour « Grenier à Seum », Médine calme le jeu, assis sur un caisson pour présenter ses expériences regrettables mais qui ont fait sa force.
Médine Future
Le rappeur orchestre son live comme une machine à voyager dans le temps, faisant des sauts dans le passé pour mieux revenir dans le présent. L’occasion de vérifier avec humour que le public présent est fidèle et « convaincu ». Le batteur scrute la foule avec une énorme lampe torche pour vérifier les mouvements de lèvres des prétendants au titre. Certains fans s’y risquent, passant l’examen avec brio (bravo à Justine et Kevin !) ou non, déchainant les punchlines du grand Médine.
De « Lecture aléatoire » (2006), à « Don’t Panik » (2008) en passant par « Grand Paris » (2017) et « Venom » (2018), Médine régale un public acquis à sa cause. Si le style vestimentaire a bien changé en 20 ans, c’est l’occasion d’entendre aussi l’évolution des prods, et une ligne directrice toujours très politisée, à écouter avec attention. L’occasion de mettre quelques tacles à l’extrême droite et aux chaines de télévision complaisantes, avec un public complice, lorsque Médine décide de renommer certains fans au nom du « grand remplacement ». Le public rit aux éclats, nous aussi.
Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’un concert de Médine équivaut à une bonne séance de sport. Le rappeur ne ménage pas son public, rappelant régulièrement qu’il va falloir « tenir le cardio ».
Fin du concert, rappel et grande surprise. La configuration de la salle permet un final à la Kanye West avec une plateforme métallique qui coulisse au-dessus du public. Le rappeur et son backeur Alivor se la jouent rockstars et s’en donnent à cœur joie.
Younès revient pour le final sur « V’la les problèmes » (qu’on adore). Pas avare, Médine descend se mêler à la foule pour terminer ce concert en communion rap.
Ce concert, hors les murs de France, a su rappeler que par sa carrière et ses titres, Médine reste un rappeur nécessaire en Francophonie pour sa verve, son discours, son énergie et sa musique. Respect.