JID n’est pas près de s’arrêter. Après son premier album commercial The Never Story en 2017, JID a entamé une ascension titanesque avec la mixtape Gangsta Grillz DiCaprio 2 en 2018, ses majeures contributions sur la compilation de 2019 Revenge of The Dreamers III sorti chez Dreamville, mais également les titres Surround Sound et Stick en 2022.
Aujourd’hui, il se prépare à la sortie de son deuxième opus, The Forever Story, suite du premier album qui l’a propulsé dans le monde du rap mainstream. L’artiste originaire d’Atlanta et recrue la plus prolifique de Dreamville, le label de J. Cole, a décidé de sortir un morceau en guise d’avant. Flow plus aiguisé que jamais, JID fait le taf sur une instrumentale de son partenaire Christo.
Quand l’Asie rencontre Atlanta
La question qui ressort le plus à la suite de l’écoute du morceau, c’est : “JID était-il réellement sur le bon rythme ?“, le rappeur ayant lui-même abordé cette question. La réponse est la suivante : JID est en rythme, et l’instrumentale aussi.
En écoutant Surround Sound sorti en janvier de cette année en compagnie de 21 Savage et de Baby Tate, on remarque d’abord le sample de One Step Ahead d’Aretha Franklin (notamment utilisé par le producteur Ayatollah pour le classique Ms. Fat Booty de Mos Def). Mais on remarque aussi le changement d’instru : la première partie au rythme trap assez basique est produite par DJ Scheme ; la seconde, qui utilise la même boucle en half-time, est produite par Christo qui n’hésite pas à modifier l’arrangement conventionnel d’une instrumentale trap.
Le même cas est ici à la disposition de l’auditeur : avec un BPM de 162 et une mesure 4/4, Christo suit un rythme musical des plus normaux. Ce qui change, c’est plutôt l’ordre des percussions, avec 2 kicks en premier temps (et un peu de swing sur le deuxième kick), des hi-hats tout ce qu’il y a de plus classiques (et superposés aux kicks qui matchent le swing) suivis de 4 rimshots et de 2 autres kicks au rythme normal, complémentés par des 808s.
Pour distinguer tout cela, il suffit de faire abstraction du seul élément hors-rythme : le sample d’instrument à cordes suivi d’un chant traditionnel, qui semble venu tout droit d’Asie du Sud (impossible de déterminer s’il s’agit d’un ektara ou d’un dranyen). Ce sample à l’allure délirante remplace le flow de JID, qui, par habitude très vivace, choisit la lenteur et une élocution gluante cette fois-ci.
“Jiddy Cauley-Stein”, géant sur une instrumentale monumentale
JID nous avait habitués à une allure incroyable. Sur des titres comme Off Deez, duel avec son chef de label J. Cole, NEVER, le single principalement responsable de son ascension ou encore son featuring sur le titre Options de la rappeuse Doja Cat, JID prend tout le monde de vitesse.
Ici, en solo, il préfère prendre son temps. “Call subs if you’re tired” (“Demande à te faire remplacer si t’es fatigué”) déclare le MC de 31 ans dans le prologue du titre. Le 29 Freestyle est pour lui une occasion de montrer ses capacités de lyriciste, alors qu’il passe d’une allitération à une assonance (“Fit me fine hit a n**** fifty five-five times // Hard times still ahead and behind, don’t whine though”), et d’une assonance à l’autre, n’hésitant pas à manipuler la langue de Shakespeare pour compléter son schéma de rimes (“She say my willy really giant, Jiddie Cauley-Stein // Kamikaze cool, killin’ mood // You will not survive, who will I include?”).
Ses changements de cadences sont successifs, succincts, à vitesse variable mais aussi collés du fait de l’élocution nasale choisie par JID. La sonorité du couplet qui en résulte ressemble au son “n” que l’on trouve également dans le mot “and”, et permet à JID de dicter la suite de son couplet de façon libre.
Sorti de cette master class en lyricisme du MC d’Atlanta, la chanson est d’une veine tout ce qu’il y a de plus traditionnelle pour JID : de la vantardise, peut-être un peu triviale compte tenu de ses capacités lyricales. Mais il ne faut pas oublier que « 29 Freestyle » ne sert que de teaser à l’album The Forever Story. Après ce freestyle dantesque, et un prochain à suivre, il faut sans doute s’attendre à du très lourd de la part de Jiddy Jid.
Texte : Tarek Diouri–Adequin