Des Bosquets de Montfermeil (93) aux scènes de New York et de Los Angeles, DJ CLiF fait résonner ses scratchs et ses rythmiques boom-bap à travers la planète hip-hop. Avec plus de 270 vidéos sur sa chaîne YouTube, cet artisan du son, reconnu par des légendes comme LL Cool J, Ice-T, B-Real, Twista, Realmatick, Onyx et Pete Rock, revient sur son parcours d’activiste passionné et sur son engagement indéfectible pour la culture hip-hop.
Interview : Claude EisZ
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DJ CLIF : À cette époque, c’était la mode de créer des labels. Cela donnait une certaine structure et on pensait pouvoir en vivre ! Depuis, ma vision a évolué, notamment après quelques déconvenues. Maintenant, j’écarte le superflu et je vais à l’essentiel, pour que chaque sortie soit rentable. Cependant, j’ai conservé l’esprit street-marketing (stickers, affiches…) pour accompagner chaque projet. Les goodies, les gens aiment ça !
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DJ CLIF : Bien sûr. J’en ai fait six, dont deux qui ont bien marché (la “Capitaine Flam” et “La Démo”). Ça a été un tremplin pour ma carrière et m’a permis de faire mes premiers pas. À l’époque, c’était difficile de se faire une place ; la concurrence était rude, le travail de qualité et la musique n’étaient pas aussi accessibles qu’aujourd’hui. Cette période m’a appris l’organisation et à mener un projet du début à la fin.
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DJ CLIF : Je me suis enfermé 5 ans dans mon labo pour apprendre les bases de la production. À l’époque, c’était bien plus complexe niveau configuration matérielle qu’aujourd’hui, avec des machines coûteuses, des manuels en anglais uniquement, des limitations comme le MIDI, et des disquettes pouvant contenir quelques secondes d’échantillonnage seulement. Bref, des problèmes que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître [rires] ! Aujourd’hui, avec les logiciels, tout est simplifié. Avec le hardware, tu as plusieurs machines à connecter ; avec le software, tout est dans l’ordinateur.
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DJ CLIF : Mes influences sont variées. J’ai grandi en banlieue avec la soul, le funk et plus généralement la musique des années 70, styles les plus répandus dans les quartiers à l’époque. Le hip-hop n’était pas encore aussi ancré dans le paysage musical français. D’ailleurs, j’encourage les jeunes à s’intéresser à tous les styles de musique, car il y a du bon partout !
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DJ CLIF : Oui, toujours ! C’est mon école et l’essence de cette musique. Après, c’est ce que tu en fais ! On peut soit commencer par les drums [éléments de batterie – NDLR], soit par la découpe du sample. Les techniques ont évolué : aujourd’hui, on peut même retravailler un sample connu (à l’époque, c’était considéré comme un sacrilège !) et en faire un morceau totalement différent. C’est notamment grâce à l’évolution des rythmiques. Cela a bougé la manière de produire. Cette évolution ouvre de nouvelles possibilités.
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DJ CLIF : Pas vraiment. Je ne suis pas très branché plugins ou nouvelles technologies. Ce qui m’intéresse, c’est de faire du son, alors je vais au plus simple.
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DJ CLIF : Je m’inspire de tout. Je suis très observateur. Un bon film, une scène, une réplique, une musique ou un lieu peuvent m’inspirer. Je crée par impulsion ; dès que j’ai une inspiration, je branche les machines et je me lance. Je suis tout sauf scolaire. J’encourage d’ailleurs chacun à s’intéresser à différentes disciplines (vidéo, photo, production, scratch), car elles se rejoignent et enrichissent la créativité. Par exemple, quand tu fais un son, tu penses à des images et inversement. C’est très intéressant de voir le lien qu’il y a entre ces différentes spécialités. Toutes se rejoignent et enrichissent ta façon de voir et de faire de la musique.
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DJ CLIF : J’ai tellement de musique en stock que j’ai besoin de les sortir. Du coup, je suis pressé d’enchaîner les projets. C’est aussi une manière de prendre ma revanche sur les obstacles rencontrés pendant ma carrière.
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DJ CLIF : Bien sûr ! Je refuse d’être un produit marketing et de compromettre mon image pour un contrat. Je veux garder le contrôle de mon image et de ma musique. L’indépendance, c’est plus qu’un état d’esprit. C’est un mode de vie : faire ce qu’on veut, quand on veut, où on veut, et avec qui on veut. Cela n’a pas de prix !
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DJ CLIF : La blaxploitation m’inspire par son esprit d’indépendance. Elle a permis aux Noirs américains de créer leur propre cinéma dans les années 70, à une époque où ils n’étaient pas représentés dans les films grand public. Ils ont tout fait eux-mêmes en occupant toutes les fonctions (réalisation, acteur, bande-son, entre autres), créant un mouvement cinématographique et artistique fort.
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DJ CLIF : Cela fait presque 15 ans que je collabore avec des MCs américains. J’ai été dans les premiers à le faire en France. J’ai vite compris qu’il fallait une vision internationale, et l’anglais est la langue la plus écoutée dans le monde. Au début, c’est toujours difficile, tu ne sais pas comment t’y prendre. Un coup, c’est toi qui sollicites le MC, une autre fois, c’est lui. À force de boulot et de pugnacité, ton travail fini par être écouté, reconnu et apprécié. Cela devient plus facile pour se connecter.
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DJ CLIF : Complètement. C’est pourquoi je travaille davantage avec des Américains. Ils sont plus spontanés, tandis qu’en France, il y a souvent cette attitude à se regarder de travers pour se donner un genre, ce qui nuit à l’énergie, cela casse le délire. Comme je veux garder cette notion de plaisir, je préfère limiter mes connexions pour garder la good vibe.
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DJ CLIF : En tant que producteur, je mets un point d’honneur à découvrir de nouveaux talents. Je cherche à donner de la visibilité à des artistes talentueux qui n’ont pas toujours l’exposition qu’ils méritent. C’est ma manière de rester ouvert à ce qui se fait. Mon public apprécie découvrir de nouvelles sonorités. Les vues, les likes et le buzz ne sont pas un gage de qualité !
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DJ CLIF : Toutes, à leur manière ! Je fonctionne au feeling, il doit y avoir une dimension humaine, sinon je ne peux pas faire de musique. Parfois il m’arrive de me tromper. Je ne vais pas faire de name dropping [rires] !
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DJ CLIF : Depuis, un moment, j’ai une relation forte avec les Etats-Unis. J’ai produit quasiment tout ce qui se fait de mieux dans l’underground US de Napoleon Da Legend à UG des Cella Dwellas en passant par Termanology pour ne citer qu’eux. Je suis suivi et soutenu par les plus grands noms du rap US. Ce qui me conforte dans ma démarche.
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DJ CLIF : Je suis passionné ! M’impliquer dans toutes les étapes de la création d’un projet (la prod°, les cuts, la vidéo, la photo, le montage, le graphisme ainsi que la fabrication) me permet de rester motivé et de donner aux gens une échappatoire à travers ma musique. C’est le meilleur médicament contre la morosité de la vie ; encore plus par les temps qui courent.
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DJ CLIF : C’est avec cette sonorité que j’ai commencé, et même si je la fais évoluer, je reste attaché à ce style. On peut continuer à faire du boom-bap 90’s tout en évoluant son approche dans la manière de le faire. Avec des drums et des mélodies diverses et variées. Tantôt plus sombre, tantôt teinté de soul avec des voix pitchées ou avec des boucles de pianos jazzy. J’ai un spectre de production assez large allant de 65 à 100 bpm.
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DJ CLIF : C’est comme pour tout, la musique est un éternel recommencement. Il parait qu’après la drill ce sera le retour du boom-bap. Le plus important est de faire ce qu’on aime.
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DJ CLIF : Pour être honnête, j’écoute beaucoup de choses sans en retenir les noms. C’est un de mes défauts. Force à tous ceux qui font de la musique ou toute autre forme d’art.
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DJ CLIF : C’est une reconnaissance gratifiante. Cela m’a flatté, c’est quand même quelque chose : c’est le Soul Brother #1 ! Et non, je n’ai pas de stratégie particulière. C’est la régularité et la cohérence de mon travail qui portent leurs fruits. Je n’ai pas de plan de carrière. Je fais tout avec le cœur. Je vais là où mon inspiration me mène.
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DJ CLIF : C’est un choix délibéré ! Je privilégie la vente directe en physique. Chacune de mes sorties se fait toujours en version vinyle, cd et des fois en version cassette audio. Ils ne sont pas disponibles sur internet, ni en magasin. Ils sont uniquement disponibles sur mes pages en message privé. J’aime le contact direct avec les gens. Ça reste très artisanal, authentique et underground. C’est ce qui me correspond.
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DJ CLIF : Mes prochaines sorties sont mon album “La Petite Vibe 3” avec des invités US de qualité, une nouvelle mixtape de rap US underground et le dernier volume de “Breakbeat De Maboul”. De nouvelles collaborations US et françaises également. Et comme d’habitude, le rendez-vous quasi quotidien de mes petites vibes en vidéo : “Music produced or music produced and cuts by myself”. C’est un lien que j’ai avec mon public : un fil conducteur avec ma musique et mes projets.
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DJ CLIF : C’est la passion qui me maintient. Plus j’en fais, plus j’ai envie d’en faire. L’expérience me permet de travailler de manière efficiente et de préserver ma vie de famille.
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DJ CLIF : Fonce ! N’attends pas après les autres. Sois d’emblée le plus autonome possible et donne-toi les moyens de réaliser tes envies. J’ai perdu trop de temps à attendre les autres. C’est aussi pour cela qu’aujourd’hui je suis hyper productif. C’est pour rattraper tout ce temps perdu !